07/08/2009

Musica Elettronica Viva :: MEV 40

Groupe incontournable de l’histoire des musiques improvisées, né dans les turbulences de la contre-culture américaine, témoin et acteur du bouillonnement de la musique électronique d’alors et de la libération du jazz, Musica Elettronica Viva (MEV) est resté jusqu’à présent d’avantage évoqué qu’entendu. Les disques New World entendent bien remédier à cela avec un très beau coffret (4 CD + copieux livret) d’enregistrements inédits, constituant à ce jour le plus imposant témoignage de l’activité du collectif.

Les voies ouvertes par la musique électroacoustique, l’émergence des pratiques improvisées et l’activisme des années 1960, marqué par la rébellion contre une certaine culture académique, furent des éléments déterminants dans la genèse de MEV. Compositeurs américains expatriés à Rome pour la plupart, Allan Bryant, Alvin Curran, Jon Phetteplace, Carol Plantamura, Frederic Rzweski, Richard Teitelbaum et Ivan Vandor fondèrent, au printemps 1966, cet ensemble d’improvisation libre, l’un des premiers du genre avec les Gruppo Di Improvvisazione Nuova Consonanza, Spontaneous Music Ensemble et autres AMM. MEV partage avec ce dernier une longévité peu commune (plus de quatre décennies d’activité) et une variabilité dans l’assemblage des participants. Le noyau dur, formé par Rzweski (piano plus ou moins altéré électroniquement), Curran (dispositifs électroniques, trompette, voix, etc.) et Teitelbaum (synthétiseurs, samplers), se retrouve néanmoins sur la quasi-totalité des enregistrements rassemblés dans cette anthologie. L’insurrection sonore est d’emblée à son apogée sur le stupéfiant « SpaceCraft », enregistré à l’Académie des Arts de Berlin en 1967, où plaque de verre amplifiée avec ressorts, piano à pouce monté sur un jerricane d’huile de moteur, synthétiseur bricolé ou Moog modulaire interagissent avec cordes vocales, cuivres et micro contacts pendant plus d’une demi-heure de dérive bruitiste aussi imprévisible que décisive. Non moins crucial, le propos se structure et s’apaise dès 1972 avec « Stop The War » qui voit le trio habituel augmenté par le tromboniste Garrett List (présent sur la majorité des titres par la suite) ainsi que Gregory Reeve (percussions) et Karl Berger (marimbaphone). Les années 1980 fournissent un abondant matériel avec deux longs sets d’un concert enregistré au Stedelijk Museum d’Amsterdam (1982) et où Steve Lacy vient imprimer sa marque lyrique, nourrie autant de Dixieland que de free jazz, au sein du groupe dont il fera partie jusqu’à sa disparition. Des concerts à New York en 1989, Berne en 1990, Ferrara en 2002 (celui-ci avec George Lewis au trombone et ordinateur) viennent compléter le recueil qui s’achève en 2007 avec une performance du groupe qui, réduit au format trinitaire, se fait plus précis et technologique que jamais.

~jcg

un coffret 4xCD paru chez
New World (80675) ; distribution : Orkhêstra

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