15/06/2010

Cremaster :: Noranta Graus A L’Esquerra

Après un long silence discographique, le duo catalan reprend du service avec une pièce électroacoustique sous très haute tension ; de quoi faire oublier Matthew Barney et les muscles suspenseurs des testicules.

Fondé en 2000, Cremaster réunit deux improvisateurs de la scène expérimentale barcelonaise : Ferran Fages et Alfredo Costa Monteiro. Tous deux guitaristes, ils ont recours à bien d’autres sources sonores selon le projet dans lequel ils sont impliqués : objets résonnants, platines, accordéon, radio ou dispositif électronique. Dans la présente configuration, Costa Monteiro manipule des objets non identifiés sur une guitare électrique tandis que Fages dompte le feedback produit à partir de pick-ups et d’une table de mixage. De quoi générer pas mal d’interférences et de parasitages et, justement, c’est de cela dont il s’agit : crépitations, chuintements, stridences, barbotements, déluges miniatures, rafales de bruit blanc et autres éléments déchaînés dont les musiciens gardent le contrôle on ne sait trop comment. La variété des textures et la fluidité de leur succession est remarquable et pas un instant on ne soupçonne qu’il s’agit d’un assemblage d’enregistrements réalisés entre 2004 et 2008. On se réjouit d’autant puisque cette période restait non documentée, le précédent disque du duo, Infra, remontant à 2003.

Il y a une indéniable qualité physique dans cette musique constamment secouée par des décharges d’adrénaline et déployant beaucoup d'efforts pour canaliser une énergie qui ne demande qu’à exploser à chaque seconde. Le stéthoscope collé à la carcasse d’un vieux transformateur électrique, on a l’impression d’en entendre les entrailles. A moins qu’il ne s’agisse des turbulences moléculaires d’une cocotte-minute sous pression ? Rien ne permet vraiment de se prononcer mais tout porte à croire qu’on risque de se prendre une bonne châtaigne à rester trop près trop longtemps. C’est miraculeusement sans dommages physiques majeurs que l’on vient à bout de ces 44 minutes de délicate brutalité, assis sur l’extrême bord de sa chaise et le tympan comme à l’affût d’un dernier foudroiement.

~ jcg

un CD paru chez Monotype (mono026) ; distribution : Metamkine

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