12/07/2010

Noah Creshevsky :: The Twilight of the Gods

Lourdement connoté, ce titre incite d’emblée à la méfiance d’autant que la parenté entre l’œuvre de Noah Creshevsky et l’opéra de Wagner ne coule pas vraiment de source. Rassemblant huit pièces composées entre 1999 et 2009, ce Crépuscule des Dieux s’inscrit pleinement dans le mode « hyperréaliste » du compositeur américain qui emploie lui-même ce terme pour désigner sa musique. Partant de sources instrumentales et vocales les plus diverses, Creshevsky les démonte et remonte en employant une technique de sampling de très haute précision, altère l’original pour en exalter le panache, rehausse une multitude de détails, accélère les mouvements, éclaire chaque note par tous les angles, produisant un tourbillon de virtuosité outrancière qui écoeure davantage qu’il n’étourdit. Pourtant il faut reconnaître que, même si elle fait plus que friser la caricature post-moderne, cette débauche de figures de style a un certain pouvoir de fascination. Il fallait oser la collision tapageuse entre klezmer et musique de Broadway (« Götterdämmerung »), le solo de guitare flamenco invraisemblable de prodige (« Estancia ») ou l’accumulation ampoulée des vocalises de Thomas Buckner (« Brother Tom ») ou d’Ellen Band (« La Belle Dame Sans Merci »). Limitant l’effet de saturation, la pièce la plus concise est aussi la plus digeste : « Three Minute Waltzes » télescope sans complexe interjections intempestives, instrumentation baroque et boites à rythme dans un montage plunderphonique pas très loin de certains passages de Radio de Naked City. Explorant simultanément un peu tous les styles, The Twilight of the Gods tourne le plus souvent à la démonstration de savoir-faire : superbe de prouesse mais privilégiant malheureusement l’ornement à la substance.

~ jcg

un CD paru chez Tzadik [Composer Series] (#8069) ; distribution : Orkhêstra